mercredi 7 octobre 2015

Phénoménologie des téléfilms de l'après-midi sur M6

A vrai dire je ne sais pas très bien ce que signifie "phénoménologie" mais je trouvais juste que ça sonnait bien pour un titre. Par acquit de conscience j'ai cherché la définition sur Google mais ça ne m'a pas tellement avancée (en fait j'ai strictement rien bité)...

En arrêt maladie pour des symptômes d'une gravité toute relative, ça fait trois jours que je déverse mes miasmes dans mon lit en ayant tout le loisir d'observer ce qui se passe dans ma télé quand j'ai habituellement le dos tourné. Ma foi, ça donne envie d'être au chômage, et quand je pense à tous les monuments de gnangnanterie que je loupe parce que je suis bêtement obligée de payer un loyer, les larmes me montent aux yeux.

Les téléfilms romantiques de M6 suivent peu ou prou tous le même schéma: un homme et une femme. Une rencontre fortuite. Les deux ont cessé de croire en l'amour pour des raisons plus ou moins justifiées : une rupture douloureuse, un veuvage précoce, un boulot trop prenant, un ex qui préfère partir étudier les grenouilles à Pétaouchnok plutôt que de se marier (c'est cette dernière raison qui a traumatisé notre héroïne de lundi dernier, j'invente rien), etc...

Le téléfilm que je me suis envoyée aujourd'hui est un cas d'école. Déjà, il est allemand, et il est de notoriété publique que nos amis teutons sont des fournisseurs très prolifiques de cucuteries télévisées. Par contre, ils semblent n'assumer que très moyennement leur teutonnerie, parce que ça a l'air de se passer aux States et que les personnages ont tous des noms à consonance anglophone.
Ça me rappelle les histoires que j'écrivais quand j'avais dix ans, où mes personnages s'appelaient Alex Lewis ou Steve Johnson parce que je trouvais qu'Aurélie Bouchard ou Guillaume Crouteau, c'était pas assez stylé.

Là, ça s'appelle "Une nounou à croquer", et quand t'as un titre qui comporte le terme "à croquer", tu sais d'avance que tu vas te frotter à un gros morceau. Un peu comme les longs métrages dont le titre contient "Love et autres... (contrariétés/drogues/désastres/cucurbitacées)" ; tu sais qu'il ne faut pas y aller, et pourtant...

La fille se nomme Stacey McDonald, c'est une jolie blonde avec zéro charisme qui  arbore perpétuellement un air de madone affligée en plein sevrage de Dulcolax. Elle a quitté son taf d'instit et son petit village suite à une fausse couche pour devenir serveuse à la grande ville. C'est rude, faut avouer que c'est autre chose que notre histoire de grenouilles de lundi dernier. Elle fait la connaissance de Ryan Cunningham, un joli architecte pété de fric qui élève seul les trois enfants de feu sa soeur, décédée avec son chum dans un accident de voiture. Ryan Cunningham a zéro charisme lui aussi, à croire qu'une charte mystérieuse impose aux directeurs de casting allemands de ne choisir que des acteurs qui ont l'expressivité d'un parpaing.

Les enfants, parlons-en :  ils ne dérogent pas à la règle qui veut que les mioches dans les téléfilms soient tous polis, sages, responsables, bref, insupportablement parfaits, et que contrairement à ces gros blaireaux d'adultes, ils aient le pouvoir de sentir au premier coup d'oeil qui est une belle personne et qui n'est qu'une chagasse vénale. Ainsi, ils ont su tout de suite que Stacey était une perle et c'est pourquoi leur tonton va proposer à la belle de devenir leur nounou. Normal. Crédible. Moi-même, pas plus tard que la semaine dernière, j'ai eu un si bon feeling avec le taxi qui me ramenait de ma soirée absinthe à la Cantada que je lui ai proposé de venir garder mes gosses pour les prochaines vacances ( certes, quand j'eus déssaoûlé je me suis souvenue que j'avais pas de gosses, mais why not.).

Il faut ajouter au tableau que Ryan Cunnigham a une associée un peu tapée et folle amoureuse de lui qui va essayer de mettre des bâtons dans les roulettes rouillées de la douce Stacey, et une maman méchante qui veut à tout prix récupérer les petits. Du genre à ramener une grosse pile de tabloïds à madame la juge pour lui prouver à quel point son fiston a une vie dissolue incompatible avec un élevage de marmaille. Je rappelle que le mec est architecte ; imagine que Closer titre toutes les semaines "Jean Nouvel, une nouvelle conquête à son bras" ou "Renzo Piano surpris encore une fois complètement pété au Silencio"...  ça n'existe pas. Et si ça existait on s'en tamponnerait allègrement les glaouis.

J'avoue, les effets secondaires des antibiotiques m'ont fait louper la fin, mais je suppose qu'elle a été assez semblable à ce que j'ai infligé à mes WC pendant ce temps-là. La maman a dû s'adoucir, l'associée éconduite a dû finir ridiculisée en tombant dans une piscine devant tout un tas de gens sous les rires espiègles des enfants, et Ryan et Stacey se sont sans aucun doute mariés, parce que dans les téléfilms de M6 il est impensable de ne pas épouser quelqu'un avec qui on a échangé trois pelles et quelques petits dèj...




Je n'ai désormais qu'une hâte, être en décembre pour voir des parpaings allemands se renifler le cul dans des téléfilms de Noël. C'est clairement le level au dessus.

PS : C'est bien Ryan et Stacey sur la photo, dans les grands espaces du Wyoming en banlieue de Düsseldorf.

PS 2 : Oui, je sais, la dernière personne qui a utilisé le mot "Pétaouchnok" est décédée en 1986.

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